Membranes de couverture et d’imperméabilisation

58 – July 2015

Pour le commun des mortels, couverture et imperméabilisation sont presque des synonymes, mais pour les concepteurs, les architectes et les entrepreneurs en toitures, il y a des distinctions importantes à faire entre les deux. Et pour compliquer un peu plus le problème, le Code national du bâtiment ne donne pas de définition claire de l’imperméabilisation.

Les membranes de couverture et d’imperméabilisation ont toutes deux pour fonction d’empêcher la pénétration d’humidité dans les espaces qu’elles recouvrent. De ce point de vue, elles partagent les mêmes besoins fonctionnels de base, mais d’autres sont assez différents. Pour obtenir les meilleurs résultats : il est important de comprendre les différentes sollicitations et contraintes auxquelles les systèmes d’imperméabilisation sont exposés, par comparaison avec les systèmes de couverture.

On peut définir l’imperméabilisation comme le traitement d’une surface ou d’une structure en vue d’empêcher les infiltrations d’eau sous l’effet de la pression hydrostatique. La membrane d’imperméabilisation non exposée sert généralement à protéger les murs, les planchers et les tunnels des eaux souterraines et aussi les utiliser pour protéger les espaces situés sous une dalle ou une esplanade au niveau du sol. On peut avoir recours à ce genre de membrane pour isoler des espaces humides, comme des salles de douches et des machineries ou des autres parties d’un bâtiment, ainsi que pour éviter les infiltrations d’eau autour des piscines, des bacs à fleurs et des tranchées.

L’eau accumulée sur ou contre une surface exerce une pression qui est directement proportionnelle à sa hauteur. La densité de l’eau est de 9,8 kilonewtons par mètres cubes (62,4 lb/pi³). L’eau exerce une force et une pression sur toutes les parois d’un récipient, mais ce sont surtout le bas des parois verticales et le fond qui la subissent. À noter qu’il faut faire la différence entre force et pression. La pression est la force par unité de surface. En unités SI, la pression s’exprime en kilopascals (kPa) et en unités impériales, en livres par pouce carré (psi). Pour mémoire, 1 kPa est égal à 0,145 psi et 1 psi

(6,8 kPa) représente environ 2,31 pi (70 cm) de hauteur d’eau (colonne d’eau), quelle que soit la surface sur laquelle repose la colonne. Un pied (30 cm) d’eau exerce une pression de 0,434 psi (3 kPa).

La vitesse d’infiltration de l’eau est déterminée par la pression hydrostatique à laquelle une structure quelconque est soumise. La méthode la plus efficace pour « imperméabiliser » une structure est de supprimer la « colonne d’eau » en assurant un bon drainage. Dans les applications où le drainage n’est pas une option viable, l’imperméabilisation est le seul moyen d’empêcher l’entrée d’humidité. Le système d’imperméabilisation choisi doit évidemment être capable de résister mécaniquement aux pressions auxquelles il sera soumis.

L’imperméabilisation peut également consister en un traitement appliqué à la surface exposée pour empêcher les infiltrations d’eau et les détériorations que l’humidité peut causer dans la structure sous-jacente (généralement du béton) en l’absence de pression hydrostatique. Ces surfaces sont en général étudiées pour résister au passage des piétons ou des véhicules, par exemple dans un garage souterrain ou sur un pont. La couche d’imperméabilisation peut être à découvert, auquel cas elle sert non seulement à empêcher la pénétration de l’eau, mais elle fait aussi office de surface d’usure et de circulation. Comme les membranes de couverture, les membranes d’imperméabilisation doivent avoir des caractéristiques de résistance aux UV, aux diverses intempéries et variations de température. Les membranes d’imperméabilisation de surface sont conçues pour avoir des propriétés particulières en fonction de leur domaine d’application, si en plus elles doivent résister à l’abrasion causée les piétons ou la circulation des véhicules. Pour les structures souterraines, en plus de la pression hydrostatique, il faut tenir compte des efforts de cisaillement créés par l’eau et le sol. Une protection adéquate contre les poussées combinées de l’eau, du sol et des mouvements de cisaillement est alors essentielle. Pour se représenter l’effet de ces contraintes, calculons la force exercée par une colonne d’eau. Au bas d’une colonne de 20 pi (6 m), la pression statique est d’environ 8,7 psi (60 kPa). Souvenez-vous que, dans un volume d’eau continu, la pression est la même en tous points, à une profondeur donnée. La pression en un point quelconque agit dans toutes les directions avec la même force, verticalement dans le cas d’une dalle ou horizontalement dans le cas d’un mur.

Une autre force à prendre en considération dans le cas de l’étanchéité de structures souterraines est l’effet du gel des eaux souterraines. La levée du sol crée un effet de cisaillement au niveau des fondations et de la membrane d’imperméabilisation qui la protège. Ces membranes sont conçues pour empêcher l’infiltration d’eau, mais pas pour résister à des efforts considérables auxquels elles sont soumises sans un support structurel adéquat. Autrement dit, la membrane doit être parfaitement supportée et en contact intime avec la structure qu’elle protège. Tout vide entre la membrane et la structure représente un point de faiblesse pouvant avoir des conséquences négatives pour l’étanchéité. Une bonne adhésion permet aussi de limiter la migration d’humidité en cas de rupture de la membrane d’imperméabilisation.

Les conditions de service pour une membrane d’imperméabilisation sont donc différentes de celles d’une membrane de toiture. Les propriétés physiques nécessaires dans les deux cas ne sont pas les mêmes. Étudions quelques-unes de ces différences.

  1. L’imperméabilisation doit avoir une durée de vie égale à celle de la construction.
    Il est généralement difficile et d’un coût prohibitif d’excaver les fondations des murs ou de dégager une dalle enfouie pour le remplacement ou la réparation de la membrane d’imperméabilisation. Contrairement aux membranes de couverture, les membranes d’imperméabilisation doivent être conçues et réalisées de manière à n’exiger aucun entretien, souvent pendant toute la vie du bâtiment. Les toitures sont évidemment plus faciles d’accès et permettent des réparations en cas de problèmes.
  2. Les membranes d’imperméabilisation baignent en permanence dans un milieu humide.
    Suivant le niveau de la nappe d’eau souterraine, la membrane peut être en contact constant avec l’eau et l’humidité du sol. Une toiture bien construite, avec une pente adéquate, assure un bon drainage et la membrane n’est exposée à l’eau que pendant de courtes périodes. De plus, les pressions hydrostatiques auxquelles les membranes de couverture sont exposées sont beaucoup plus faibles. Même sur un toit mal drainé, les accumulations d’eau ne dépasseront pas 2 pouces (50 mm) en surface, ce qui ne représente qu’une pression d’environ 0,07 psi (0,5 kPa).
  3. Une barrière d’imperméabilisation doit résister aux produits chimiques contenus dans le sol.
    Les contaminants auxquels la membrane d’imperméabilisation est exposée sont différents de ceux que l’on rencontre sur un toit. Le sol contient souvent des substances acides ou alcalines, des sels et divers autres composés chimiques susceptibles d’attaquer les matériaux d’étanchéité. Le système d’imperméabilisation doit aussi être choisi pour résister à l’exposition à ces ambiances chimiques pendant toute sa durée de vie. Bien que certains toits soient aussi exposés à des contaminants produits par des cheminées qui débouchent à proximité, la composition est généralement connue et des mesures préventives peuvent être prises. Dans le sol, la nature des contaminants chimiques varie d’un endroit à l’autre, et même avec la profondeur à un même endroit.
  4. La barrière d’imperméabilisation doit aussi résister aux vicissitudes de la construction. Contrairement aux toitures plates, les membranes d’imperméabilisation ne sont normalement pas exposées à la circulation à pied. Par contre, elles ont besoin d’être protégées jusqu’au remblayage des excavations, ou jusqu’à l’application de la couche d’usure et du recouvrement. À noter que même pendant le remblayage, des pierres, des débris ou des objets pointus peuvent endommager la membrane. Dans le cas d’une dalle horizontale, on applique en général une couche de protection, mais la principale cause de dommages est l’utilisation de la surface par les autres corps de métier. Cela peut aussi se produire sur un toit plat, mais les conséquences sont moins graves parce que la membrane reste accessible.
  5. L’imperméabilisation doit pouvoir suivre certains déplacements du substrat qu’elle recouvre. Les murs et les sols de béton peuvent subir certains tassements et retraits au cours de la prise. Les dalles sont aussi exposées à des mouvements thermiques et à des flexions sous l’effet des charges. La membrane d’imperméabilisation doit pouvoir s’accommoder de petites fissures et résister à la rupture sous l’effet des dilatations et des contractions thermiques. Il faut tout de même savoir que l’ampleur de ces mouvements est sensiblement moins forte que sur un toit, de sorte que les propriétés d’élasticité et de résistance aux déchirures sont moins importantes dans le cas des applications d’imperméabilisation.

La membrane d’imperméabilisation est généralement enfouie dans un environnement où les températures sont relativement constantes, contrairement aux toitures qui sont exposées à des températures ambiantes variant au cours de la journée et surtout de la saison. Enfin, elle n’est pas exposée aux effets néfastes de la lumière solaire, des précipitations et de l’érosion éolienne.

Le tableau suivant résume les propriétés respectives attendues des membranes de couverture et d’imperméabilisation.

Il est impératif que les ingénieurs, les architectes et les entrepreneurs comprennent bien les différences et les similitudes entre couverture et imperméabilisation pour s’assurer de spécifier et installer le bon système, car les produits sont conçus pour l’une ou l’autre de ces applications, mais pas les deux.

Les opinions exprimées ici sont celles du Comité technique national de l’ACEC. Ce bulletin est diffusé pour apporter au lecteur de l’information technique sur les toitures. Les faits, les commentaires, les opinions et les conclusions publiées ne doivent pas être interprétés comme des avis techniques professionnels et le lecteur est invité à ne pas agir en fonction de l’information contenue dans ce bulletin sans s’être auparavant renseigné auprès d’un professionnel du domaine, ingénieur ou architecte. L’ACEC, ses dirigeants, ses membres et ses employés n’assument aucune responsabilité à l’égard des informations professionnelles données ni des conséquences des interprétations que le lecteur pourrait fonder sur le contenu de ce bulletin.